Maquis-Douane
Thierry

On venais de se retrouver à trois après deux semaines de chemins séparés. Yvain nous attendais dans le seul bar de Lin, au bord du lac d’Ohrid. J’avais retrouvé Antoine la veille à Diellas, entre le lac d’Ohrid et le lac de Prespa. Quelques bières de retrouvailles plus tard, nous sommes partis liquider le peux de monnaie Albanaise (Lekë) qu’il nous restaient et on a été trouver un terrain pour passer la nuit.

Il était encore relativement tôt dans la soirée, parfait pour une petite balade le long du chemin de fer abandonné qui se dirige vers la frontière macédonienne. Antoine avait déjà passé quelques frontières dans la brousse en solitaire la semaine précédente. Un petit sentier après les rails nous donnaient espoir qu’il serait possible d’éviter un col se situant 300m plus haut pour arriver à la douane. Nous partâmes donc à l’aventure en direction de la Macédoine du Nord en suivant les berges du lac.

Après quelques centaines de mètres nous arrivons devant notre premier obstacle : une grande habitation grillagée qui nous coupe la route. Antoine part explorer à pieds pour essayer de trouver un passage. En ce temps, le propriétaire viens nous voir Yvain et moi pour nous montrer le chemin à prendre. Ça ne va pas être facile de passer avec les vélos, mais en enlevant les fontes et en dégageant quelques ronces ça devrait passer. Avec un peu de détermination il est possible d’accomplir de grandes choses.

Cinq cent mètres de débrouillardise plus loin nous tombons enfin sur une petite clairière et un sentier assez prometteur dans la bonne direction. Après avoir été explorer sans les vélos, Antoine revient avec une bonne et une moins bonne nouvelle. Le passage semble pratiquable, mais on tombe droit sur une barrière à nouveau fermée. Bonne nouvelle : on entends des voix de l’autre côté de la barrière. Peut-être vont-ils nous laisser passer ? Au point où on en est, on ne fera plus demi-tour.

Arrivés devant la grille, il semble bien que c’est un poste militaire. Des personnes en uniforme d’armée viennent nous saluer mais nous refusent l’accès par la base. Nous allons à nouveau devoir contourner cet obstacle par la brousse. Heureusement ils nous indiquent le chemin à prendre. Quinze minutes plus tard nos pneus touchons enfin de l’asphalt macédonien. Deux heures de galère pour faire deux kilomètres, mais nous voilà enfin passé la frontière.

La route n’était pas longue avant qu’une voiture de police nous arrête. Sûrement les militaires qui ont du les prévenir que trois pignoufs chelous essayaient de passer la frontière illégalement avec des vélos chargés. Les policiers prennent nos documents d’identités et nous demandent après quelques minutes de laisser nos vélos là, chager la voiture avec toutes nos affaires et aller avec eux jusqu’au poste.

Chacun son tour ils nous ont demandés de vider les sacs un à un, sortir toutes les affaires et ils ont vérifié dans chaque petit compartiment ce qu’il y avait. Le processus à bien duré entre deux et trois heures. C’était long. Très long. Tout le monde en avait marre à la fin. Une fois la fouille terminée et n’ayant rien trouvé, les policiers nous demandent d’attendre deux heures de plus avec eux le temps de faire les papiers. Nous en profitons pour manger notre pic-nic au soleil sur la pelouse du commissariat.

Une fois l’attente terminée, nous signons les papiers et les agents nous ordonnent de nous rendre au poste de douane. Un des papiers qu’ils nous ont donnés contient la phrase suivante :

DECISION FOR EXPULSION OF ALIEN FROM THE REPUBLIC OF NORTH MACEDONIA

Deux choses à noter de cette phrase :

  1. nous sommes des aliens
  2. nous sommes expulsés du pays

On rigole un bon coup et on se plie à leurs ordres. Une fois à la douane on demande à l’agent à partir de quand nous pouvons rerentrer dans le pays. Nous avons encore l’espoir à ce moment là que nous pouvons peut-être retenter notre chance de manière officielle de rentrer en Macédoine le lendemain. Il n’en est rien. Nous sommes banis du pays pour trois mois. Jamais nous aurions crus que cette histoire irait si loin. Nous attendons de nouveau une éternitée après quoi on nous fait comprendre qu’on aura droit à une deuxième fouille. On commence à en avoir marre. Heureusement la deuxième fouille n’a duré que 10 minutes. Le gars en avait vraiment rien à foutre. Une fois cette fouille terminée, nous sommes redescendus à la ville de Prennjas, 10km de là où on s’était réveillés le matin même. Il est 18h, nous sommes claqués et nous estimons que nous avons besoin de 3 bureks et une bière chacun pour se remettre de nos émotions.

passage un peu technique le long du lac

premier obstacle : il nous faudra contourner l’habitation (non mais franchement, qui habite là ?)

pic-nic au commissariat en attendant la paperasse